La réalisation d’une impression 3D repose sur la transformation d’images obtenues par imagerie en coupe en un volume tridimensionnel. Le modèle 3D ainsi créé permet de se représenter avec précision l’anatomie de l’animal en taille réelle (Fig. 1) 1.
Figure 1 – Impression 3D d’un humérus de chien.
Il existe différents types d’impression 3D mais le principe reste le même : le volume est créé par la superposition de couches de matériel 1. Il ne s’agit pas de sculpter un volume mais de le créer intégralement. Divers matériaux peuvent constituer la base du modèle tels que le plastique, le métal, le verre, la céramique, les polymères et même des cellules.
Certains matériaux sont stérilisables comme par exemple l’acide polylactique 1. De la couleur peut également être rajoutée.
Le processus se découpe en 4 étapes : acquisition, traitement, modélisation numérique et impression des informations 1.
1re étape : l’acquisition des données se fait par scanner, IRM ou échographie 4D. L’épaisseur des coupes a un impact direct sur la qualité du modèle 3D. Les coupes de 1mm permettent une meilleure résolution/exactitude des données que les coupes de 1,5 ou 2 mm.
2e étape : les images sont exportées en format DICOM (digital imaging, and communications in medicine). Ensuite, les structures d’intérêt sont isolées en fonction de leur densité et de leur topographie. Tout détail non important est exclu de l’image (tissus mous, colon, etc.).
3e étape : cette étape est optionnelle et consiste à retoucher une nouvelle fois les fichiers.
4e étape : cette étape consiste en l’importation des fichiers souhaités dans le logiciel associé à l’imprimante.
Quelles sont les utilisations potentielles ?
L’impression 3D présente une application pédagogique majeure dans l’éducation et l’entraînement des étudiants et diplômés vétérinaires notamment en anatomie et chirurgie 1, 2. Par exemple, il est rendu possible de se former à certaines techniques chirurgicales avant de se lancer sur des animaux vivants. Les modèles ainsi obtenus sont fidèles à l’affection étudiée par rapport à l’exercice sur cadavre sur lequel elle n’est pas forcément présente 3. Cela permet de s’entraîner à des procédures standardisées et reproductibles. Aussi, un modèle de l’arbre bronchique a été créé à la faculté
d’Auburn pour faciliter la compréhension des endoscopies respiratoires 2. L’étude de l’anatomie sur modèle tridimensionnel pourrait diminuer la demande en cadavres.
L’impression 3D a également des applications dans la radiothérapie en permettant la fabrication de boucliers personnalisés et pour déterminer la position idéale du faisceau de rayonnement 1.
Les applications en médecine humaine et vétérinaire sont déjà nombreuses et comprennent la planification des chirurgies crâniofaciale, maxillofaciale (Fig. 2a et 2b), pelvienne, spinale, neurologique, cardiovasculaires et viscérale 1.
Figure 2a – Impression 3D d’un crâne en prévision d’une maxillectomie partielle pour retirer un chondrosarcome nasal. Le trait noir correspond au geste chirurgical prévu.
Figure 2b – Scanner de contrôle du résultat final qui correspond fidèlement à ce qui avait été planifié.
La modélisation 3D permet d’affiner significativement le diagnostic et le traitement des pathologies grâce à une planification préopératoire plus précise 4, 5. Des prothèses faciales ou orthopédiques personnalisées peuvent être produites de la sorte.
Des prothèses bioniques ont ainsi été créées pour permettre le retour à la locomotion de certains animaux ou pour combler un site d’ablation tumorale importante comme une maxillectomie. De la sorte, des becs, membres ou mâchoires artificiels ont pu être imprimés et implantés.
L’impression 3D est particulièrement intéressante dans la gestion des cas de fractures complexes (dont les fractures vertébrales et luxations atlanto-axiales) et de déviation angulaire des membres. La radiographie et l’imagerie en coupe montrent des limites dans la gestion de ces cas notamment lors de déviations angulaires ou en torsion 4.
La création du modèle 3D permet une planification plus précise du plan opératoire (Fig. 3) 5.
Figure 3 – Impression 3D d’un radius/ulna et planification préopératoire d’une chirurgie correctrice de radius curvus à l’aide d’un fixateur externe d’illizarov.
Les déformations peuvent être directement mesurées sur le modèle et les plaques orthopédiques peuvent être modelées à l’avance sur l’os ainsi obtenu 2. On peut imprimer le côté lésé mais aussi le côté sain pour l’utiliser comme référence en peropératoire après stérilisation du modèle (par exemple lors de fractures complexes du bassin, Fig. 4) 2.
Les chirurgiens peuvent s’entraîner à l’avance sur le modèle obtenu et ainsi anticiper d’éventuelles complications et être plus à l’aise et plus rapides en situation réelle. Des masques faciaux peuvent être imprimés pour faciliter la cicatrisation osseuse lorsqu’une intervention n’est pas possible (ex. : fractures du crâne).
La bio-impression, c’est-à-dire l’impression de cellules vivantes et de tissus, est un domaine de recherche en pleine expansion 1.
Avantages et inconvénients de la technique
Les avantages associés à cette technique sont nombreux.
Elle permet de diminuer le temps opératoire, les complications postopératoires (notamment le risque infectieux), la morbidité, la mortalité et le coût de l’utilisation du bloc opératoire 1, 2, 4. Selon la composition du modèle, celui-ci peut être stérilisé afin d’être utilisé en peropératoire (Fig. 4).
Figure 4 – utilisation peropératoire du modèle 3D du côté sain du bassin pour modeler la plaque sur une fracture complexe.
La création du modèle 3D de l’animal permet une meilleure communication avec les propriétaires qui comprennent dès lors mieux la complexité ainsi que les tenants et aboutissants de la chirurgie 1, 4.
Parmi les limitations liées à cette technique, on retiendra entre autres le coût du matériel, la limite du volume imprimable (propre à chaque type d’imprimante), et le temps d’impression 1, 2.
L’imprimante coûte environ 300 euros pour les premiers prix, 2 000 euros pour une imprimante de moyenne gamme (Fig. 5).
Figure 5 – exemple d’imprimante 3D disponible sur le marché.
S’agissant d’un produit récent, le coût de la maintenance de ces appareils n’est pas encore connu 1.
Les contraintes liées aux tissus mous ne peuvent pas être identifiées par cette technique 4.
Le temps d’impression de plusieurs heures réserve cette technique aux chirurgies planifiées à l’avance 2. Elle est impossible pour les cas urgents.
Les modèles utilisés pour l’entraînement des chirurgies présentent un coût non négligeable (2 000 – 3 000 US$/modèle) 3.
De plus, ils ne permettent pas de représenter fidèlement la texture des tissus 3.
En définitive, l’impression tridimensionnelle est un domaine prometteur en pleine expansion qui deviendra bientôt incontournable dans la gestion de cas complexes et dans la formation des vétérinaires.