Choisir sa suture

et son matériel de suture

Objectifs pédagogiques

  • Connaître les différents types de matériel de suture disponibles.
  • Être capable de choisir son fil en fonction du tissu à suturer

Auteur: Dr. S. Etchépareborde. 16-01-2014- Centre Hospitalier Vétérinaire des Cordeliers, 29 avenue du Maréchal Joffre, 77100 Meaux. E-mail: setchepareborde@chvcordeliers.com Cet article a été publié dans : Prat Vet (2013) 48: p 706-709 Déclaration publique d’intérêts sous la responsabilité du ou des auteurs : néant.

Résumé

Les fils de suture sont décrits selon trois caractéristiques : naturel ou synthétique, tressé ou monofilament, résorbable ou non. Il faut connaître les inconvénients et les avantages de chaque caractéristique afin d’utiliser le matériel le plus adéquat pendant une chirurgie.

Secondairement, c’est le choix du chirurgien qui prime en fonction de sa préférence quant à la mémoire de forme du fils, sa tenue de nœud, sa facilité de manipulation. Finalement, on pourra alors choisir entre différentes marques en fonction du coût.

Crédits de formation continue

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Choisir son matériel de suture

Le choix d’un matériel de suture comprend le choix de la composition du fil mais aussi la taille de l’aiguille, la forme de l’aiguille et le fait qu’elle soit montée ou non. En aucun cas, le prix du matériel utilisé n’est à prendre en compte. L’argent que l’on pense gagner en économisant sur le choix des sutures est, si l’on regarde de près, perdu durant les complications liées à ce mauvais choix (déhiscence, infection, péritonite) qui sont peu ou pas facturées au client. Le but de cet article est de décrire la théorie, ce qui devrait être fait idéalement et qui a priori sera suivi du minimum possible de complications.

En pratique, un mauvais choix de suture (fil tressé dans des plaies infectées, fil tressé pour l’intestin, fil à résorption rapide pour la ligne blanche,…) n’est heureusement pas toujours sanctionné d’une complication, mais celles qui surviennent peuvent être facilement évitées au moment de la chirurgie.

Comment choisir son aiguille?

Aiguille montée ou aiguille à chas

Le seul avantage des aiguilles à chas et donc des bobines de fils est le coût plus faible. Au-delà du fait que le fil des bobines, s’il n’est pas stocké de manière convenable, peut s’altérer avant même son utilisation, les aiguilles à chas sont plus traumatiques que les fils montés.

Le diamètre de l’aiguille est beaucoup plus important que le fil et par définition, le fil est doublé au niveau du chas créant donc une brèche dans le tissu deux fois plus grande que nécessaire.

Se pose aussi le problème de la stérilité de l’aiguille ainsi que l’altération de sa pointe avec le temps.

Le type de l’aiguille

Deux critères sont à prendre en compte : la taille et la forme (ronde ou triangulaire).

  • La taille de l’aiguille ainsi que son ouverture est souvent inhérente à la suture choisie et à la taille de la suture.

La courbure de l’aiguille est indiquée par la proportion d’un cercle qu’elle représente (3/8, 1/2, 5/8).

La taille de l’aiguille indiquée sur la boîte correspond à la longueur de l’arc décrit par l’aiguille, de sa pointe à la jonction avec le fil. Lorsqu’il est possible de choisir, c’est plus une question de choix personnel en fonction du confort d’utilisation.

  • La forme de l’aiguille est en revanche de première importance (Figure 1).

1. L’aiguille ronde est peu traumatique et ne déchire pas les tissus.

C’est donc l’aiguille de choix pour tous les viscères. En effet, la moindre déchirure au passage du fil peut entraîner une fuite (contenu intestinal, urine) autour du fil.

En revanche, dès que le tissu à suturer devient plus riche en collagène (tendon, ligne blanche, peau), il peut être difficile de passer à travers avec une aiguille ronde et on préférera alors une aiguille triangulaire.

2. Les aiguilles triangulaires les plus utilisées sont dites “reverse cutting”.

La différence entre les aiguilles triangulaires “cutting” et “reverse cutting” tient à l’orientation du triangle formé par la section de l’aiguille.

Pour ces dernières, la base du triangle est orientée vers l’intérieur de la courbure de l’aiguille. De ce fait, le danger de couper à travers les tissus avec l’aiguille est nettement diminué et le trou formé par l’aiguille forme une large portion de tissu sur laquelle vient s’appuyer la suture.

Comment choisir le matériel de suture ?

Une pléthore de fils de suture nous est maintenant accessible et il est facile de s’y perdre.

Tous ces fils peuvent être classés dans 6 catégories suivant qu’ils soient tressés ou monofilament et naturel ou synthétique et résorbable ou non (Tableau 1).

Naturel ou synthétique ?

Les trois fils d’origine naturelle sont l’acier (utilisé en orthopédie), la soie (pour la chirurgie du canal artériel entre autres) et le catgut.

Nous ne pouvons que déconseiller l’utilisation du catgut. Ce fil a tendance à s’effilocher, il provoque des réactions inflammatoires importantes et sa résorption est difficilement prédictible et donc souvent trop rapide [1].

De plus, le catgut n’existe pas en aiguille montée et est donc plus traumatique qu’un fil avec aiguille montée (cf. ci dessus).

Résorbable ou irrésorbable ?

Sauf pour certaines interventions spécifiques (colposuspension, shunt, canal artériel,…), l’utilisation des fils non résorbables est réservée à la fermeture de la peau.

Une exception à cette règle est l’utilisation de fils non résorbables pour la fermeture de la ligne blanche lorsque l’on s’attend à une cicatrisation prolongée (sepsis, Cushing, hypoprotéinémie) [2].

Idéalement, il ne faut pas utiliser de fils résorbables pour la peau : ils créent plus d’inflammation et la cicatrisation est donc plus longue et l’esthétique en souffre.

La perte de résistance et la résorption complète des fils résorbables sont détaillées (Tableau 2).

  • Le polydioxanone a la résorption la plus lente, il peut donc être utilisé dans toutes les situations.

Néanmoins, une résorption si lente pour une suture sous-cutanée par exemple n’est pas forcément nécessaire et un fil à résorption rapide comme le polyglécaprone 25 peut être utilisé dans ce cas.

Notes

R : résorbable. NR : non résorbable. Entre parenthèses, derrière les noms déposés, figure la nature du fil. Seuls sont reportés ici les fils les plus couramment utilisés en médecine vétérinaire des petits animaux : le Tableau n’est ni exhaustif pour la nature des fils ni pour les noms déposés.

  • Ce dernier (polyglécaprone 25) est le fil qui perd sa résistance le plus rapidement. Il est suffisant pour des sutures intestinales ou pour la vessie mais il ne résiste pas assez longtemps pour des pexies et il serait imprudent de l’utiliser pour la ligne blanche.
  • Entre ces deux matériels, le glycomère 631 présente des délais intermédiaires en termes de perte de résistance et de résorption et peut donc être utilisé dans toutes les situations.
  • La polyglactine 910 dont la résistance à 15 jours est comparable au glycomère 631 peut aussi s’utiliser dans de nombreuses situations, excepté la suture des organes creux, à cause de sa capillarité, et la suture cutanée comme tous les fils résorbables comme mentionné ci-dessus.

Tressé ou monofilament ?

Les avantages du fil tressé sont sa résistance à la traction et à la compression ainsi qu’une très bonne tenue du nœud et une facilité d’utilisation due à son manque de mémoire de forme [3].

En revanche, il est plus traumatique pour les tissus qu’un monofilament mais surtout il présente une certaine capillarité.

Cette dernière propriété permet la migration des bactéries avec les fluides le long de la suture et c’est pour cette raison que les fils tressés sont à déconseiller pour toutes sutures de viscères creux.

De même, l’utilisation de fils tressés pour la suture de peau est associée avec une plus grande inflammation [4] et permet aux bactéries de migrer de l’extérieur vers l’intérieur de la plaie.

Comment choisir la taille des sutures ?

Il est intéressant de constater que dans les cas de déhiscence, c’est rarement le fil qui est rompu mais plutôt que celui-ci soit passé à travers les tissus en les cisaillant [5].

En résumé, on a souvent tendance à surestimer la taille du fil à utiliser.

Plus le fil est petit, mieux il tient le nœud et moins il cause de traumatisme aux tissus. Il n’existe pas de recommandation particulière pour chaque type de tissus mais le Tableau 3 résume la taille des fils les plus souvent employés dans la littérature [6].

Conclusion

Le premier critère à considérer pour choisir son matériel de suture est donc le tissu suturé.

Le deuxième critère est la préférence du chirurgien et son habitude à manipuler un matériel de suture plutôt qu’un autre. Finalement, grâce à la pléthore de fils proposée sur le marché, il est alors possible de choisir entre différentes marques en fonction du coût.

Il est cependant important de comprendre que la différence de coût peut s’expliquer par la qualité d’aiguisage, la qualité du sertissage du fil dans l’aiguille et la qualité du fil de suture lui-même.

Mémo

Durant notre carrière, nous allons tous utiliser des kilomètres de fils de suture. Au-delà de cette réalité amusante, cela représente, bien sûr, un réel coût au jour le jour associé à chaque chirurgie. Trop souvent, le choix du matériel de suture utilisé est fait en fonction de cette contrainte alors que ce critère devrait être le dernier de la liste, seulement utilisé pour choisir entre une marque ou une autre.

À lire

  1. Roush JK. Biomaterials and Surgical Implants. In : Slatter DH, ed, Textbook of Small Animal Surgery. Third ed. Philadelphia : Saunders ; 2001 : 141-8.
  2. Birchard SJ. Adrenalectomy. In : Slatter DH, ed. Textbook of Small Animal Surgery. Third ed. Philadelphia : Saunders ; 2001 : 1694-700.
  3. Tan RHH et coll. Suture materials : composition and applications in veterinary wound repair. Aust Vet J. 2003 ; 81 : 140-5. 
  4. Kawcak CE, Baxter GM. Surgical materials and wound closure techniques. Vet Clin North Am Small Anim Pract. 1996; 12 : 195-205.
  5. Poole GV et coll. Suture technique and wound bursting strength. Am Surg. 1984; 50 : 569. 
  6. 10. Boothe HW. Selecting suture materials for small animal surgery. Comp Contin Educ Pract Vet. 1998 ; 20 : 155-63.
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