Carcinome épidermoïde de l’extrémité rostrale du septum nasal
Traitement chirurgical
Nous décrivons ici une rhinotomie rostro-latérale pour l’excision complète de la tumeur.
L’intérêt est d’obtenir un résultat clinique et esthétique très satisfaisant et d’éviter l’ablation totale de la truffe.
Un chien, croisé golden retriever mâle entier de 12 ans, est présenté pour des éternuements depuis 3 semaines ainsi qu’une discrète épistaxis latéralisée à gauche. De rares ronflements ainsi que des épisodes de toux quinteuse et expectorante sont décrits. Une perte de poids et une dysorexie sont également rapportées.
Examen clinique
L’examen clinique général met en évidence une masse à l’entrée de la narine gauche associée à une épistaxis et une discrète maladie parodontale
Hypothèses diagnostiques
L’association de l’épistaxis unilatérale gauche et des éternuements évoque en premier lieu une cause locale telle qu’une néoplasie, un corps étranger, une rhinite (bactérienne, fongique ou idiopathique), une coagulopathie, un traumatisme ou une affection dentaire.
En ce qui concerne les épisodes de toux, une paralysie laryngée ou une tumeur sont suspectées tandis qu’une origine infectieuse ou cardiogénique semble peu probable.
Examens complémentaires
Les analyses sanguines effectuées (numération formule, biochimie standard, ionogramme et temps de coagulation) sont dans les normes usuelles et excluent un désordre métabolique.
Un examen tomodensitométrique de la tête est réalisé sous anesthésie générale. À l’induction, l’examen laryngé révèle une motricité diminuée à gauche. Le scanner met en évidence la présence d’une masse sur l’extrémité rostrale du septum nasal gauche. Elle mesure environ 6,2 mm d’épaisseur, 18,5 mm de hauteur et s’étend sur 21,4 mm de longueur (Fig. 1 et 2).
De rares sécrétions sont présentes dans la portion rostrale de la cavité nasale droite, mais aucune lyse osseuse n’est visible. Les nœuds lymphatiques locorégionaux (mandibulaires et rétropharyngiens) sont de taille et de forme normales.
L’examen tomodensitométrique est étendu à l’étage thoracique et ne révèle aucune anomalie.
Des biopsies avec un pistolet automatique à biopsie (Trucut®) de la masse ainsi que de la muqueuse nasale droite sont réalisées et envoyées en laboratoire. L’examen histopathologique (coloration standard à l’Hémalun-ÉosineSafran) est compatible avec un carcinome épidermoïde cutané moyennement différencié. Une rhinite lymphoplasmocytaire et hyperplasique subaiguë à chronique, modérée, dépourvue de spécificité est décrite à droite.
Le bilan d’extension étant négatif et les carcinomes épidermoïdes métastasant tardivement, une chirurgie curative peut être envisagée. À cette localisation, ceci est généralement obtenu par une ablation complète de la truffe. La localisation sur l’extrémité rostrale du septum nasal et l’âge avancé du chien autorisent dans ce cas à pratiquer une chirurgie « moins invasive » en espérant pouvoir obtenir une guérison clinique : une rhinotomie rostro-latérale.
Prise en charge chirurgicale
Le chien est prémédiqué avec du chlorhydrate de morphine à 0,1 mg/kg et du midazolam à 0,2 mg/kg puis il est induit au propofol à 4 mg/kg par voie intraveineuse. Il est maintenu par anesthésie volatile à l’Isoflurane.
L’intervention chirurgicale consiste en une rhinotomie rostrale puis latérale permettant l’excision de la masse.
Le chien est placé en décubitus sternal (Fig. 3).
Une incision horizontale au bistouri électrique est réalisée rostralement au niveau du planum nasale (Fig. 4),
puis une incision du cartilage alaire gauche est effectuée de la commissure latérale en direction dorso-caudal sur 4 cm (Fig. 5).
Une fois incisés, les tissus sont rétractés dorsalement à l’aide de monofilaments afin d’exposer le vestibule nasal et de visualiser la masse sur le septum (Fig. 6).
Elle est retirée à l’aide d’un bistouri électrique avec 5 mm de marges chirurgicales, tout autour. Une fois la masse retirée, les tissus cicatrisent par seconde intention (Fig. 7).
Le cartilage alaire ainsi que le planum nasale sont suturés en trois couches, la muqueuse nasale par un surjet simple avec un monofilament résorbable (PDSII4-0), le tissu sous-cutané par un surjet simple avec le même matériel et un surjet cutané est réalisé avec un monofilament non résorbable (fildenylon).
La réduction anatomique et le résultat esthétique postopératoire sont très satisfaisants (Fig. 8)
L’analyse histologique de la masse confirme le carcinome épidermoïde, une tumeur maligne peu différenciée, dégrade élevé et se développant à partir du revêtement malpighien au niveau du septum nasal. Les marges chirurgicales analysées sont considérées comme étroites mais saines.
Suivi clinique
Le chien est hospitalisé pendant 24 heures sous analgésiques, antibiotiques et anti-inflammatoires. Il présente une discrète épistaxis et s’alimente rapidement 12 heures après l’intervention. Un traitement médical est mis en place à domicile avec du tramadol, de la céfalexine et du méloxicam pendant 1 semaine. Le port de la collerette est indiqué pendant minimum 15 jours. Il retrouve rapidement un bon état général.
Des contrôles à 5 et 15 jours sont effectués, les plaies sont propres et en cours de cicatrisation. Une démarcation rose pâle à 15 jours est encore présente au niveau de la cicatrice du planum nasale (Fig. 9).
Un examen otoscopique et tomodensitométrique de la tête et du thorax sous sédation sont réalisés 4 mois après l’intervention. Aucun signe de récidive n’est observé au niveau de la truffe et le parenchyme pulmonaire ne montre aucune anomalie. Les nœuds lymphatiques locorégionaux sont normaux. L’aspect esthétique et fonctionnel est excellent, aucune gêne respiratoire n’est notée (Fig. 10).
Au moment de la publication de cet article un contrôle téléphonique a été effectué et aucune anomalie clinique n’est rapportée après 5 mois postopératoires.